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mardi 22 décembre 2009

L’atelier « militance de données » a permis de réunir de nombreux acteurs qui utilisent les données publiques pour promouvoir leurs idées et donner plus rendre les militants plus persuasifs.

La plateforme Candidats.fr de l’April représente sans doute l’initiative la plus avancée en la matière : depuis les présidentielles de 2007 et pour toutes les élections qui ont eu lieu depuis, elle permet de fédérer les efforts pour qu’un maximum de candidats aux élections s’engage en faveur du Logiciel Libre. Les militants répartis dans toute la France collectent les contacts des candidats, les prises de contact avec ceux-ci et les signatures du Pacte du Logiciel Libre.

Techniquement, la plateforme est divisée en deux : un CMS (dotclear) et une application développée par l’April de mutualisation de contact. C’est un logiciel libre téléchargeable sur la plateforme GNA qui a été développé par un adhérent de l’April assisté de deux contributeurs. Environ 700 militants l’utilisent durant les élections et la plateforme a été récemment déployée en Belgique.

Le projet ElecteurPlus.org du site Appel pour le Revenu de vie s’inspire indirectement de Candidats.fr en proposant un outil d’interpellation militante sur le sujet du revenu de vie. Des partages de données entre ces sphères militantes sont tout à fait souhaitables.

C’est d’ailleurs ce qu’à fait l’April lors des élections européennes en montant une opération avec une dizaine d’organisations de promotion du Logiciel Libre. Les associations européennes se sont regroupées pour proposer le FreeSoftwarePact.eu et ainsi offrir une vitrine aux différents projets d’interpellation des candidats. Pour ce projet, des greffons d’interconnexion des bases « Candidats.fr » ont été développés afin de pouvoir échanger les données sur les signataires.

Ces plateformes gérent à la fois des données publiques (les candidats aux élections, la géographie politique française) et des données personnelles (contact des candidats, coordonnées des militants, …). De ce fait, la publication des données et leur partage n’est pas un élément trivial. Ainsi, pour les européennes, il a été choisi que seules les informations publiques sur les candidats et les signataires pouvaient étre partagées.

Dans un autre registre, le projet Mémoire Politique, débuté en 2006 par La Quadrature du Net référence les votes et les interventions des parlementaires sur les questions du numérique en général et tout particulièrement sur les projets français HADOPI et DADVSI et sur le Paquet Télécom européen. Il permet donc d’historiser les prises de positions des élus et de les classer en fonction de leur appétence aux problèmes liés aux libertés numériques.

En synthétisant toutes ces données et en les recoupant avec les informations permettant de contacter les élus des parlements français et européens, cet outil permet de faciliter la prise de contact entre les militants et les élus et donc d’organiser de manière décentralisée l’interpellation des élus par les citoyens.

La plateforme est basée sur MédiaWiki et l’insertion des données combine d’un coté des scripts automatiques PERL et de l’autre une intervention humaine bénévole de militants de La Quadrature du Net. La fraîcheur des données publiées en fait un outil de référence dans la communauté des libertés numériques mais également au sein des parlements : un certain nombre d’assistants utilisent au quotidien l’annuaire proposé, celui-ci étant souvent plus complet et pratique que les versions professionnelles.

ProPublica est une ONG favorisant le journalisme d’investigation aux Etats-Unis. A partir du travail de centaines de bénévoles qui suivent les projets financés par le plan de relance, l’organisation liste les entreprises, leur degré de moralité, leur avancement ou les lobbyistes qu’elles emploient.

C’est ce même type d’utilisation du crowd-sourcing que cherche à faire Bug Brother en référençant toutes les caméras de vidéo-surveillance en France. A l’heure actuelle, il est impossible de savoir où se trouvent les caméras alors que la loi l’impose. Une Google Map spécifique a donc été créée pour les recenser et pour référencer les villes et les départements ainsi équipés, permettant de suivre en temps réel l’état d’avancement du projet.


La première version
de la carte de vidéo-surveillance

La publication de ce projet a suscité près de 200 réponses dont une petite centaine jugées qualifiées. Les données sont partagées dans un document de type tableur, mais leur positionnement sur une carte pose des problèmes techniques. Cette association entre journalisme (l’initiateur du projet est le journaliste Jean-Marc Manach), militance citoyenne et technicité est un élement central de ce type de projet. Ces trois sphères s’alimentent et ont intérêt à travailler ensemble. C’est sans doute un facteur important pour des projets de « data-journalisme » à l’image du projet sur le cumul des mandats de députés réalisé par LePost.fr et Jean-Marc).

La Netscouade, habituée à travailler avec les partis politiques, a une expérience plus classique de l’organisation militante. Ils ont par exemple travaillé sur le projet de DémoCarte, outil de consultation publique. Par l’intermédaire d’outils sur une carte, cette application web a permis de dynamiser la camapgne du PS lors des municipales en offrant aux habitants de Marseille la possibilité de signaler les problèmes à régler dans leur ville, qu’il s’agisse de simple soucis urbains ou de problèmes plus graves.

Les données électorales sont un thème que vont investir les partis. Elles permettent d’avoir une vision de la sociologie électorale fine et donc d’orienter le travail militant vers des zones où l’électorat est plus volatile ou l’abstention plus forte. Aux États-unis, cette utilisation des données publiques à des fins électorales et leur qualification par des militants bénévoles est assez neuve et soulève des interrogations. La société qui est intervenue pour aider le parti démocrate durant l’élection présidentielle, a depuis été accusée de privatiser ces données par des militants qui estimaient qu’elles leur appartenaient.

L’atelier s’est enfin terminé avec un retour d’expérience lié à l’éducation. Le rectorat de Paris à décider d’utiliser un logiciel dénommé AFELNET pour affecter les élèves dans les lycées parisiens, entraînant des erreurs pour 2 500 élèves qui se sont retrouvés sans lycée à la rentrée, alors qu’ils avaient entre 13 et 16 de moyenne générale. Les parents d’élèves n’arrivant pas à obtenir d’informations claires sur ce dysfonctionnement se sont saisis eux-mêmes de la question.

Ils se sont donc organisés autour du site ParentsEnColère.net pour obtenir une réaction du ministre. Le logiciel, comme une boite noire, joue le rôle de rempart entre les parents d’élèves qui souhaitaient comprendre le mode d’attribution et l’administration. Devant son refus de dévoiler les secrets du logiciel, ils ont décidé de l’étudier en crowd-sourcingen demandant aux parents d’élèves de partager le dossier de leurs enfants. Malheureusement du fait de la réutilisation de données nominatives et personnelles, les familles se sont peu mobilisées, et avec seulement 80 réponses le résultat n’a pu être suffisant. Cet exemple montre bien qu’à la frontière de la problématique des données, se pose le problème des logiciels qui les utilisent. Plus ils seront ouverts, plus le traitement qu’ils produiront seront reconnus socialement.

jeudi 17 décembre 2009
Au Sénat le 14 décembre 2009
Au Sénat le 14 décembre

Nous avons publié lundi matin une étude d’impact de la nouvelle carte électorale proposée par le gouvernement, alors que le texte entrait en discussion au Sénat dans l’après-midi. Une bonne occasion pour nous pencher sur le fonctionnement de la Haute Assemblée, moins connu que celui du Palais Bourbon. Premier constat : les discussions sont plus feutrées et les sièges plus confortables, mais les débats pas moins clivés. D’un côté, la gauche soulignait le non-respect de l’intercommunalité, le peu de fraicheur des données utilisées ou la non prise en compte de certaines remarques du Conseil d’État ; de l’autre, la droite valorisait le travail de fourmi réalisé par le Secrétaire d’État, rappelait la promesse présidentielle de donner une voix aux Français résidents à l’étranger et soulignait l’exigence du Conseil Constitutionnel de procéder à ce redécoupage. On se croirait donc à l’Assemblée nationale… à une exception près : les votes.

L’usage des scrutins publics est en effet beaucoup plus fréquent au Sénat qu’à l’Assemblée. Une volonté d’exprimer clairement les votes de chacun ? Pas si sûr : à chaque scrutin, une demie-douzaine de sénateurs quittent leur fauteuil pour aller voter en apportant chacun aux huissiers une pile de votes pour les votants de son groupe. Ils sont rejoints par les sénateurs non-inscrits et éventuellement ceux souhaitant voter différemment de leur formation. Ainsi, pour la majorité des votes, sont exprimées les voix de tous les sénateurs présents en séance… ou pas.


Un exemple de vote
par groupe au Sénat

Lundi à 20h30, surprise générale : le représentant du Nouveau Centre, se trompe et fait voter l’ensemble de son groupe pour un amendement proposant la suppression de l’article unique. L’amendement est alors adopté à 167 voix contre 156 et le texte se retrouve sans article. Il se voit donc rejeté. Cette erreur du sénateur met en lumière une organisation des votes assez originale et illustre bien les dangers qu’elle peut représenter. Mais ce mode de scrutin est-il conforme au règlement de la Haute Assemblée ?

Benoit, un de nos membres, a creusé la question. L’article 63 du règlement indique que les « sénateurs ne sont autorisés à déléguer leur droit de vote que dans [six] cas ». L’ordonnance n° 58-1066 du 7 novembre 1958 ajoute que cette délégation n’est autorisée qu’à titre exceptionnel. L’article 64 stipule, de plus, que les sénateurs sont tenus d’informer le Président des motifs de leur délégation de vote, et celui-ci peut choisir de les autoriser ou non. Enfin l’article 27 de la Constitution, indique que « nul ne peut recevoir délégation de plus d’un mandat. ».

En supposant que toutes ces règles aient été respectées, cela signifie que 162 sénateurs au moins étaient présents lors du vote, et que chacun disposait d’une délégation. Il est évident que nous n’avons pu compter autant de sénateurs sur les brefs plans larges diffusées en direct par le Sénat. Il est tout à fait possible qu’ils l’aient été. De plus, chaque délégation devrait avoir être motivée et validée par la présidence du Sénat. Benoit a donc décidé d’en avoir le cœur net et a écrit le 16 décembre un courrier au Président du Sénat pour lui demander des précisions. Ces informations permettraient de vérifier la conformité du scrutin et d’accréditer le bon fonctionnement de la Haute Assemblée.


La lettre envoyée au Président du Sénat par Benoit de Regards Citoyens.

Ce fâcheux incident a tout de même eu des conséquences heureuses. Le rejet temporaire du projet de loi offre une plus large visibilité au redécoupage électoral, et donc à notre étude. Des centaines de citoyens se sont penchés sur notre méthode et nos données. Leurs remarques précises ont permis de valider les tendances que nous dessinions et d’affiner nos chiffres sur deux circonscriptions dont les bureaux de vote étaient particulièrement difficiles à géolocaliser : la Réunion et la Haute-Garonne. Nous avons donc mis-à-jour notre étude en conséquence : nous espérons qu’elle alimentera les débats programmés pour reprendre à l’Assemblée nationale au mois de janvier.


Consulter notre étude d’impact

Complément d’information : Comme l’avaient révélé des travaux passés de Benoit et Pierrick, la question de la conformité des scrutins au Sénat avait déjà été soulevée par des parlementaires à l’Assemblée comme au Sénat.

samedi 5 décembre 2009

Article de Claude Mislin publié dans Le Pays

Le Pays

Grâce à un site internet tout à fait sérieux, on peut désormais évaluer le travail des députés dans le moindre détail.

Le site a été créé à l’occasion des débats sur le projet de loi Hadopi en septembre 2009. NosDéputés.org cherche à mettre en valeur l’activité parlementaire des députés à l’Assemblée nationale en synthétisant les différentes activités législatives et de contrôle du gouvernement. […]

Alors, les 13 députés francs-comtois, deux PS et 11 UMP, sont-ils des parlementaires appliqués ? Méritent-ils une bonne note ? Il est impossible de faire un classement général final car chaque député a sa marotte, comme par exemple Jean-Michel Villaumé qui a signé 660 amendements ou Michel Zumkeller qui a posé 226 questions écrites, ce qui fausse les moyennes. En revanche, il est possible de tirer quelques leçons critère par critère. […]

Force est de constater que certains parlementaires sont trois fois plus présents que d’autres… Un argument en or pour ceux qui prônent le non-cumul. Le citoyen électeur, grâce à cet outil, pourra se faire une idée de l’implication de son député au cours de son mandat. C’est un critère plus fiable que les promesses électorales.

Lire l’intégralité de l’article sur le site LePays.fr
vendredi 4 décembre 2009

L’Ambassade de Suède a eu la bonne idée de nous inviter à la table ronde « E-administration et e-dialogue : regards croisés Suède – France » qu’elle organisait le 2 décembre avec la mairie de Paris.

Centralisation des démarches administratives en ligne, concertations citoyennes, projets d’e-pétitions en préparation à Paris (ppt) ou déjà en cours à Malmö, accompagnement sur le numérique tout au long de la vie, ce rendez-vous proposait un bon panorama des actions menées par les institutions publiques en Suède et en France pour favoriser les usages et les interactions entre les citoyens et l’administration sur Internet. Un panel riche donc mais où les projets français restent parfois un peu trop dans la simple déclaration de principe voire dans la survalorisation d’efforts surtout commerciaux.

Ces différentes présentations ont donné naissance à d’intéressants débats entre universitaires, institutionnels, citoyens ou représentants d’entreprise. Ainsi les problèmes de sécurité des données personnelles liés à la fédération de comptes ou de données personnelles ont été soulevés, tandis que d’autres évoquaient les possibilités offertes notamment à travers OpenID de garantir une authentification forte et décentralisée à la fois. Il s’agira sans doute de l’un des principaux défis techniques que devront relever les administrations électroniques. L’autre grand enjeu sera très probablement la question de l’accessibilité des données fournies par les états : qu’il s’agisse du contenu (le conseil suédois des langues expliquait par exemple son travail visant à promouvoir l’emploi d’un langage clair et accessible dans toute production administrative) ou du format employé, lequel doit permettre la meilleure réutilisation possible des contenus.

malmo

Mais cette table ronde a surtout été l’occasion de mettre en valeur le travail de la présidence européenne suédoise en matière de gouvernance numérique. Ce pays qui a fait de la publication et de la diffusion des données publiques une rêgle constitutionnelle, semble en effet profiter de ses 6 mois de présidence pour pousser de telles pratiques un peu partout en Europe. Après avoir chargé la fondation Vinnova de réfléchir dans un long rapport aux futurs possible de l’e-gouvernance, la ville de Malmö a accueilli à la mi-novembre la 5ème conférence interministérielle européenne de l’e-gouvernance dont les conclusions sont tout à fait engageantes. L’article 11 intitulé « Accroître la disponibilité des informations du secteur public pour leur réutilisation » est particulièrement encourageant : dans cette déclaration de principe, les états membres s’engagent en effet pour une plus grande divulgation des données publiques :

« Nous améliorerons la disponibilité des informations du secteur public afin de permettre leur réutilisation, dans l’esprit et les conditions établis par la Directive 2003/98/CE. Nous encouragerons la réutilisation des données publiques par des tiers afin que soient développés des services d’intérêt maximal pour le public. Ces nouvelles [applications] basées sur la réutilisation d’informations publiques soutiendront la transition de l’Europe vers une économie numérique de la connaissance. »

Nous sommes persuadés, qu’au-delà d’une stimulation économique, faciliter l’accès aux données publiques va dynamiser la démocratie et valorisera les actions des institutions tout comme celles des élus. Espérons donc que ces engagements se concrétisent par la publication réelle de données afin que la société civile puisse s’en saisir et que puissent émerger des usages intéressants ! Ce sera l’objet de l’OpenDataCamp organisé dans une semaine à Paris, venez nombreux !

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