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mercredi 29 janvier 2014

Obligation légale suite au vote du Sénat lors des débats sur la Transparence, la réserve parlementaire se pare de nouveaux atours de transparence : première fois l’Assemblée nationale publie, comme son président s’y était engagé dès le mois d’octobre 2012, l’intégralité des données pour l’année 2013. Ce sont ainsi 80,94 millions d’euros, distribués en près de 11000 subventions destinées à des collectivités, mais également à des associations (part dite de Bercy, qui n’avait encore jamais été rendue publique), qui sont dévoilées aujourd’hui par l’Assemblée sur son site Internet.

Si les tableaux proposés sur le site officiel marquent un réel progrès par rapport aux fichiers PDF fourni par l’Intérieur il y a quelques mois, ces données restent toujours peu accessibles : impossible de trier par montant* ou de rechercher par bénéficiaire, et impossible d’additionner les montants par député, bénéficiaire ou département, ni donc de les cartographier, etc. Comme pour les PDF de 2011 et 2012, Regards Citoyens a donc collecté l’ensemble des informations publiées et les a complétées d’informations propres aux députés concernés tirées de l’API de NosDéputés.fr. Nous redistribuons ainsi en Open Data un fichier propre qui permettra, comme la dernière fois nous l’espérons, de voir fleurir de nombreuses réutilisations et visualisations autour de ces données démocratiques essentielles.

Télécharger les données de la réserve parlementaire 2013 des députés en Open Data

À titre d’exemple, voici ainsi la carte des montants totaux distribués par département et par groupe politique :

L’analyse de ces données est source de nombreuses informations. Tout d’abord, elle permet de vérifier si la promesse de répartition égalitaire a été respectée par le président Bartolone. Si la répartition par député s’est considérablement homogénéisée (d’environ 30 000 € de base avant 2012, les députés distribuent maintenant chacun environ 130 000 €), la présidence ainsi que certains présidents de groupes ou de commissions et vice-présidents semblent pouvoir attribuer plus de subventions que les autres députés (jusqu’à plus de 700 000 € pour Gilles Carrez).

Autre nouveauté trouvée dans ces données, la réserve de groupe : certaines subventions sont ainsi attribuées non par des députés, mais par l’ensemble d’un groupe politique. Tous les groupes sauf l’UDI le font. Ces subventions semblent être attribuées majoritairement aux associations ayant des activités nationales mais on y trouve aussi des communes ou des associations locales. Les données publiées ne permettent malheureusement pas de répondre aux légitimes questions sur l’origine et les choix ayant présidé à ces attributions.

Enfin, les dérives pointées lors de la publication de la réserve allouée aux collectivités en 2011 ne semblent pas avoir été corrigées : des parlementaires continuent à attribuer sans sourciller des subventions à la commune dont ils sont maires ou conseillers municipaux. Gilles Carrez (UMP) a attribué 500 000 € à sa commune Perreux-sur-Marne, Huguette Bello (PC) verse la totalité de sa réserve à Saint-Paul (commune dont elle est maire) mais c’est le cas également de nombreux autres parlementaires dont Hervé Morin (UDI), Jean-François Copé (UMP), Jacqueline Fraysse (GDR) ou Christian Jacob (UMP). Les groupes ECOLO et SRC semblent avoir interdit en interne ce type de pratique.

Il convient enfin de saluer une fois encore le travail salutaire de l’association « Pour une démocratie Directe » à l’origine des plaintes à l’encontre du Ministère de l’Intérieur l’an dernier, qui ont poussé progressivement la Place Beauvau, puis les 2 chambres à prendre le pli de la transparence.

Les programmes créées pour le parser et pour la cartographie sont des logiciels libres disponibles en ligne.

* L’Assemblée a depuis comblé ce manque en ajoutant le tri par montant.

mercredi 18 décembre 2013

Regards Citoyens se félicite de l’ouverture, aujourd’hui, d’une nouvelle version du site des données publiques de l’État, data.gouv.fr. Doté d’une ergonomie améliorée et d’un fonctionnement ouvert et collaboratif, cette nouvelle version devrait faciliter la valorisation des données publiques par leur réutilisation. L’arrêt de la course au chiffre ayant incité des administrations à fragmenter leurs données en milliers de fichiers marque un sérieux pas en avant qui permettra enfin de retrouver aisément les données publiées.

Le choix d’Étalab de parier sur les communautés semble aujourd’hui payer : au lieu de passer par de lourdes procédures et un marché excluant les acteurs de l’innovation, Étalab a décidé cette fois d’utiliser CKAN, un logiciel libre issu de la communauté OKFN, et de faire travailler une petite équipe sur son amélioration. Pour un coût considérablement réduit, la mission fait même profiter de ses développements à tous en reversant son travail au fur et à mesure à la communauté [1].

L’application d’une politique guidée par la gouvernance ouverte s’illustre également dans la place accordée aux contributions extérieures : des producteurs non-étatiques peuvent désormais eux aussi déposer des données, des partenariats avec d’autres sites Open Data de collectivités ou d’associations [2] ont été mis en place, et tout un chacun peut venir référencer des jeux de données ou des réutilisations sur le site officiel.

L’inauguration du nouveau data.gouv.fr s’accompagne également d’une petite révolution pour l’OpenData français. En plus de rendre publiques quelques données attendues comme les comptes de campagne des partis politiques, du CNCCFP ou de l’Institut de Recherche et Documentation en Économie de la Santé, le gouvernement a annoncé en comité interministériel ce matin la libération prochaine de données d’une dizaine d’administrations aujourd’hui soumises à d’onéreuses redevances : les données juridiques de la DILA (les codes de loi, la jurisprudence et le journal officiel, aujourd’hui vendus à une dizaine d’entreprises pour plusieurs centaines de milliers d’euros), celles de la CADA et les données financières des collectivités territoriales seront bientôt librement réutilisables par tous. En entérinant par ailleurs l’impossibilité de créer toute nouvelle redevance pour des données publiques, le gouvernement assure enfin pour de bon que l’Open Data pourra se développer de manière pérenne en France.

Si des efforts restent à faire en matière de respect des formats ouverts ou de formations des agents de l’État aux bonnes pratiques de gouvernance ouverte, les efforts menés par Étalab et les annonces faites aujourd’hui par le gouvernement sont très encourageants. Nous ne doutons pas que les efforts engagés continueront à porter leurs fruits en 2014.


[1] : Les développements et la correction des erreurs sont publiés sur : github.com/etalab
[2] : Y compris NosDonnées.fr que Regards Citoyens co-administre avec OKFnFr.

lundi 16 décembre 2013

Pupitre de vote électronique
Photo Assemblée nationale

Deux sources bien informées des rouages du Parlement1 viennent d’annoncer tour à tour une réflexion engagée par le Bureau de l’Assemblée nationale sur la question de la transparence des votes et délégations de vote des députés. Au cœur du plaidoyer de Regards Citoyens de longue date, une telle réforme constituerait un véritable choc en matière de transparence de l’activité législative. Encore faudra-t-il pleinement l’assurer !

92 % des scrutins publics ne listent pas les votants !

Aussi surprenant que cela puisse paraître, la France est en effet l’un des rares pays démocratiques à laisser ses citoyens dans l’incapacité totale de connaître le détail des votes de leurs représentants au Parlement. Au-delà de l’ahurissante anticonstitutionnalité des votes au Sénat, la situation actuelle de l’Assemblée nationale relève également de l’ubuesque.

Alors qu’ils sont réalisés sur des boîtiers électroniques enregistrant les votes nominatifs des députés, les scrutins dits « publics » n’ont en fait de « public » que le nom. Au contraire des rares 8 % de « scrutins solennels », utilisés essentiellement lors du vote final des projets de lois 2 pour lesquels une liste exhaustive des votants est fournie, le relevé des « scrutins publics » ne présente que la liste des « rebelles » au sein de chaque groupe politique. Si l’ensemble des députés était en hémicycle pour voter lors de chacun des scrutins, cela pourrait suffire à retrouver par déduction le vote des « fidèles » à leurs groupes, mais cela n’est jamais le cas. Il est donc tout simplement impossible de savoir pour quoi ont voté chacun des députés. Un comble pour une démocratie représentative.

Les délégations de vote, une pratique opaque et source de polémiques

Alors que la Constitution prévoit la possibilité pour les députés de déléguer leur droit de vote à un collègue à titre exceptionnel uniquement 3, l’usage des délégations est en réalité systématisé en toute opacité et même organisé au sein des groupes politiques de l’aveu des députés eux-mêmes. Or en l’absence de mention de ces délégations sur les relevés de vote, il est également impossible de savoir quels députés parmi ceux indiqués se sont effectivement déplacés pour entériner leur opinion dans l’hémicycle.

À de nombreuses reprises, cette pratique a suscité des remous, des accidents de séance voire des accusations de fraude. Comme Christian Jacob, Patricia Adam, Lionel Tardy ou encore Christian Paul, Bernard Accoyer, ancien président de l’Assemblée nationale, s’en est encore ému il y a quelques semaines au travers de plusieurs rappels au réglement pointant l’usage déviant des délégations et l’incompréhensible impossibilité de connaître les votes individuels de chaque député.

Des élus de tous bords politiques se sont déjà exprimés pour un alignement des règlements des deux assemblées vers un standard de transparence simple : la publication intégrale des noms et positions de chaque votant, ainsi que le nom du délégué lorsqu’il est fait usage de délégation. C’est la norme déjà appliquée dans la quasi totalité des parlements modernes. Il est aujourd’hui temps pour la France de s’y atteler, comme y invitait la promesse du Président Bartolone lors de son investiture de faire de l’Assemblée une « maison de verre ».

Des pistes de réforme encourageantes, mais encore affinables

C’est donc une excellente initiative de la part du Bureau de l’Assemblée que de se pencher enfin sur ces problématiques. Les pistes évoquées comme en réflexion vont dans la bonne direction : outre la publication intégrale des noms des votants lors des scrutins publics, il serait proposé d’interdire l’usage des délégations lors de ces mêmes scrutins.

Ces deux décisions prises seules risqueraient cependant d’entraver la volonté de transparence affichée : en continuant à traiter les scrutins solennels différemment des scrutins publics, l’analyse des informations relatives aux votes resterait difficile pour les chercheurs, journalistes et citoyens. La suppression de toute possibilité de déléguer son vote y compris pour ces scrutins solennels pourrait sembler plus naturelle afin d’assurer aux scrutins une meilleure représentation des forces en présence lors de chaque débat. Cette solution aurait également la qualité d’alléger le travail administratif des groupes parlementaires qui perdent un temps précieux à organiser et déclarer ces délégations. Cependant, puisque les délégations sont prévues par la Constitution, ce n’est pas leur existence qui pose problème mais leur opacité. Il serait donc suffisant de les conserver à la condition expresse d’en assurer la pleine transparence comme nous le proposions par exemple par amendement à l’Instruction Générale du Bureau en janvier dernier

Nous en appelons à l’ensemble des parlementaires pour apporter leur soutien au président Bartolone et lui permettre de réformer réellement la publicité des scrutins pour en assurer enfin la transparence. Nos homologues à l’étranger mènent de passionnantes études à partir de l’analyse des choix politiques de leurs parlementaires pour éclairer les citoyens sur une part importante de l’activité parlementaire. Députés, n’ayez plus honte de vos votes à l’Assemblée nationale !


[1] : Innovation : les scrutins publics seraient rendus publics par Pierre Januel, Cuisines de l’Assemblée de L’Express.fr, et Les votes par scrutin public transparents à l’Assemblée ? par Samuel Le Goff, Contexte.com
[2] : 62 scrutins solennels sur les 757 scrutins électroniques réalisés depuis le début de la législature.
[3] : Article 27 de la Constitution : « Le droit de vote des membres du Parlement est personnel. La loi organique peut autoriser exceptionnellement la délégation de vote. ». L’ordonnance n° 58-1066 du 7 novembre 1958 portant loi organique autorisant exceptionnellement les parlementaires à déléguer leur droit de vote précise le cadre précis de ces exceptions pour absences motivées.

mardi 5 novembre 2013

Une réaction au « Plan d’action pour la France pour l’application de la Charte du G8 pour l’ouverture des données publiques » a été ajoutée à la fin de ce billet.

Nouvelle étape pour l’OpenData en France : le Premier Ministre vient de rendre public le rapport commandé à Mohammed Adnène Trojette, magistrat à la Cour des Comptes, sur l’ouverture des données publiques encore enfermées derrière des redevances payantes. Le gouvernement en tire cependant peu de conséquences…

treemap

Cartographie des redevances issues du rapport Trojette (p. 43)

Le rapport, finalisé le 15 juillet 2013, décortique les 35 millions d’euros de recettes générés chaque année par quelques 50 jeux de données payants. Le rapport dresse un constat global implacable : « des redevances de réutilisation, diversement motivées, et parfois faiblement légitimes » au regard de leur coût de mise à disposition, des « recettes en constante érosion »[1], « provenant pour une part non négligeable d’acheteurs publics »[2] et des « pratiques préjudiciables à la réutilisation des données publiques ». Au-delà du bilan économique, le rapport pointe des problèmes inquiétants : non-respect du droit de la concurrence[3], stratégies contribuant « à consolider les positions dominantes, voire à les accroître »[4], administrations se « faisant les porte-paroles, volontaires ou inconscients, des acteurs établis »[5] et des « modèles qui brident l’innovation »[4]. La conclusion est sans appel : « La transition vers de nouveaux modèles économiques revêt un caractère d’urgence pour maintenir et améliorer la qualité des informations publiques, voire pour garantir la pérennité du service public »[6].

Face à un tel réquisitoire, la parole de Jean-Marc Ayrault était très attendue. Alors que la publication du rapport a été reportée de 3 mois pour permettre aux administrations de mettre en oeuvre des modèles orientés OpenData, l’absence d’annonce du gouvernement est significative du flou avec lequel l’exécutif gère la libération des données publiques et plus largement le numérique. Le rapport Trojette rappelle à juste titre le rôle central du politique dans les choix des modèles économiques[7], le Premier Ministre refuse pourtant d’arbitrer et laisse les administrations gouverner seules. Elles devront décider de l’avenir de leurs redevances respectives d’ici à 2014, mais les premières propositions d’évolution annoncées par exemple par la DILA laissent présager du pire[8].

Extrait du tableau Part des redevances dans le
budget des services producteurs
(p. 108)
données complètes téléchargeables en CSV

« Nul n’est censé ignorer la loi ». Pourtant, en dépit de l’engagement pris par le Président lors du G8 de libérer les données démocratiques essentielles, telles que la législation ou le Journal Officiel (DILA), il faut toujours passer à la caisse avant de pouvoir créer des outils citoyens innovants réutilisant ces textes. Les quelques revendeurs de données publiques continueront également à exercer leurs monopoles sur les données cartographiques (IGN), les registres des entreprises (INSEE et INPI), le cadastre et les dépenses des collectivités territoriales (DGFIP), les données météorologiques (Météo-France), les marées (SHOM)… Les montants de ces redevances sont pourtant dérisoires au regard des ressources des administrations concernées : 2,2 % pour l’INSEE, 0,4 % pour la DILA, 0,03 % pour la DGFIP et une moyenne nationale sous la barre de 1 %…[9]

Des modèles contributifs, comme ceux que nous décrivions dès 2010 et avons suggérés à Étalab en début d’année, auraient pourtant permis de conserver des revenus provenant d’acteurs privés, tout en levant les barrières financières incompatibles avec l’OpenData. Reprises dans les pistes proposées par le rapport[10], ces propositions ont déjà été adoptées par de nombreuses collectivités territoriales, dont la métropole nantaise ou la capitale.

En décidant de jouer la montre, le gouvernement Ayrault sous-estime les enjeux économiques et sociaux liés à l’Open Data et démontre ses hésitations en matière de modernisation de l’action publique. Les nombreuses pressions, externes comme internes, pour conserver le statu quo de la fermeture et de l’opacité continuent à plomber la France dans le mouvement en marche de l’OpenData. Comme l’ont montré les multiples évaluations internationales récentes[11], notre pays perd de son influence en persistant à enfermer derrière des barrières financières toutes ces données pourtant cruciales. Ce n’est pas en refusant de s’engager que la France trouvera sa place de leader en matière d’OpenData.

Retrouvez le rapport Trojette dans son intégralité en ligne ainsi que le cahier n° 2 détaillant les jeux de données sous redevances

Mise à jour du 7 novembre 2013 : Les services du Premier Ministre viennent de mettre en ligne un « Plan d’action pour la France pour l’application de la Charte du G8 pour l’ouverture des données publiques ». Regards Citoyens se réjouit à l’annonce de la libération de nouvelles données, comme la liste des élus ou les statistiques sur le logement ou l’emploi, ainsi que l’amélioration de certaines autres, comme l’attribution des marchés publics ou le détail des dépenses de l’État au-dessus d’un certain seuil.

Rappellons cependant que l’engagement pris par François Hollande lors du G8 reposait principalement sur la libération des données relatives aux lois et règlements (aujourd’hui vendues par la DILA), des données géographiques précises (détenues par l’IGN) ou encore des registres des entreprises (INSEE, INPI). Autant de données pour lesquelles la levée des redevances recommandée par le rapport Trojette est prioritaire pour la France.

Regards Citoyens espère donc que ce document n’est qu’un document d’étape, et attend des décisions promises pour le 12 décembre une politique gouvernementale plus ambitieuse encore, afin de permettre la pleine mise en oeuvre des engagements présidentiels.


[1] Page 43 du rapport
[2] En moyenne 14% des clients directs sont des acteurs publics (page 44)
[3] Pages 35 et 91 du rapport
[4] Page 81 du rapport
[5] Page 34 du rapport
[6] Page 100 du rapport
[7] Page 83 du rapport
[8] Page 31 du cahier numéro 2 du rapport
[9] Page 42 du rapport
[10] Page 96 du rapport
[11] L’Open Data Barometer 2013 de ODDC project publié le 29 octobre 2013 et l’Open Data Index 2013 de l’OKFN publié le 30 octobre 2013.

mercredi 9 octobre 2013

Le Conseil constitutionnel a censuré et écorné 15 dispositions au cœur des lois relatives à la transparence de la vie publique. La transparence des liens d’intérêts, l’incompatibilité entre activités professionnelles et mandat parlementaire, et la capacité donnée à la Haute Autorité de la Transparence à faire cesser des conflits d’intérêts sont les grandes victimes des deux décisions rendues publiques ce matin sur la loi organique et la loi ordinaire.

Si l’architecture globale des textes est préservée, assurant à la Haute Autorité de la Transparence des pouvoirs de contrôle étendus, les « sages » ont censuré de nombreuses dispositions relatives à la transparence. Les élus n’auront plus l’obligation de déclarer leurs « liens susceptibles de faire naître des conflits d’intérêts », ni ceux de leurs « famille », « parents ou enfants ». La publication des déclarations d’intérêts des hauts fonctionnaires, membres de cabinets ministériels, collaborateurs du président ou membres d’autorités indépendantes est également supprimée. En dépit du rôle central joué par ces personnes sur la décision et la dépense publique et donc sur la vie des français, le Conseil constitutionnel a estimé que leurs intérêts ne regardaient pas les citoyens. Enfin, la consultation des patrimoines des élus des grandes villes françaises ne sera finalement pas possible en préfecture : seuls les patrimoines des parlementaires seront soumis à cette disposition.

Le Conseil constitutionnel a par ailleurs décidé de censurer toutes les dispositions souhaitées par le gouvernement et votées par les parlementaires concernant l’incompatibilité d’un mandat parlementaire avec d’autres activités professionnelles. Les parlementaires pourront continuer à facturer du conseil à qui ils le souhaitent en tant, par exemple, qu’avocats d’affaire ou lobbyistes, et pourront même débuter une nouvelle activité professionnelle en cours de mandat. Un sacré coup porté par le Conseil à l’exemplarité et la revalorisation des élus.

Enfin, les réserves émises par le Conseil constitutionnel ont sérieusement impacté la capacité de la Haute Autorité à faire cesser des conflits d’intérêts : il ne lui sera en effet plus possible de rendre publics ses constats sur les déclarations incomplètes, ni d’enjoindre un décideur public en situation de conflit d’intérêts à faire cesser celui-ci si cela l’oblige à quitter son mandat ou sa fonction.

La seule avancée proposée par les sages touche leur propre institution. Ils ont rendu immédiate l’interdiction d’exercer la profession d’avocat pour les membres du Conseil constitutionnel. Étant membre de droit de cette institution, l’ancien président Nicolas Sarkozy devra donc cesser sa profession dès la promulgation de la loi qui devrait logiquement être publiée au Journal Officiel cette semaine.

Regards Citoyens est soulagé de constater que la publication en OpenData des déclarations d’intérêt des élus et celle de la réserve parlementaire n’ont pas été retouchées par le Conseil. Si le Conseil constitutionnel a bien écorné les textes globalement équilibrés qui étaient sortis du Parlement, Regards Citoyens se réjouit de la promulgation prochaine de ces lois qui permettent une avancée, à périmètre néanmoins limité, en matière de contrôle et de transparence des élus français. Espérons que, même partiellement censurées, ces lois restent efficaces pour éviter de futurs scandales politiques.

Lire le courrier envoyé le 1er octobre par Regards Citoyens au Président du Conseil constitutionnel sur ces textes.

mercredi 10 juillet 2013

Hervé Lebreton, président de l’association « Pour une démocratie directe », a rendu publiques, lors d’une conférence de presse ce matin à l’Assemblée nationale, 10 374 subventions allouées en 2011 dans le cadre de la réserve parlementaire. Le montant total est de 153,5 million d’euros.

Après deux ans et demi de démarches administratives et la condamnation du ministère de l’Intérieur, cette association de Villeneuve sur Lot a finalement obtenu le détail de l’usage pour l’année 2011, par l’ensemble des parlementaires, de la part de la « réserve parlementaire » destinée aux collectivités territoriales. Elle poursuit aujourd’hui ses démarches auprès de Bercy pour lever le voile également sur la part de la réserve attribuée aux associations.

Les informations transmises en PDF par le ministère de l’intérieur étant peu exploitables, nous les avons transformées en collaboration avec Alexandre Léchenet en données, enrichies de certaines informations relatives aux parlementaires et les publions sous conditions OpenData dans un format tableur.

Télécharger les données en tableur

Déclaration OpenData France
lundi 17 juin 2013

Nous, citoyens, lanceurs d’alertes, associations, ONG ou journalistes, exigeons du gouvernement et du parlement qu’ils prennent des mesures assurant une plus grande transparence des activités de lobbying.

Le volet pharmaceutique de l’affaire Cahuzac, la mise en examen du numéro 2 du groupe Servier ou l’émotion suscitée par la diffusion sur France 2 de scènes de promiscuité entre hauts-fonctionnaires, parlementaires et lobbyistes de la société British American Tabacco montrent que la France ne peut plus ignorer les problèmes posés par la non régulation du lobbying.

La commission des lois de l’Assemblée nationale a chargé la future Haute Autorité de la Transparence de la « définition de lignes directrices portant sur les relations avec les représentants d’intérêts ». C’est un premier pas mais il faut désormais que le gouvernement et le parlement saisissent cette occasion pour exiger des lobbyistes la transparence et le respect des règles de déontologie.

Les décideurs publics français semblent partager ce constat : dans un récent sondage de TNS-Sofres, ils sont majoritaires à penser que le lobbying pratiqué par le secteur privé n’est pas assez transparent et à soutenir la création d’un registre obligatoire.

À l’occasion de l’ouverture des débats des projets de loi sur la transparence de la vie publique, nous demandons donc que la Haute Autorité soit chargée :

  • d’édicter des règles déontologiques s’appliquant à toute personne cherchant à influencer la prise de décision publique ;
  • de publier un registre dans lequel tous les lobbyistes auront l’obligation de s’enregistrer et de déclarer annuellement leurs activités, leurs clients et leurs dépenses.

Un amendement simple, s’inspirant des dispositions adoptées au Québec, a été proposé aux parlementaires pour leur permettre d’atteindre ces objectifs. Nous leur demandons de s’en inspirer pour charger la Haute Autorité de ces compétences.

Si l’écoute de tous les acteurs de notre société est nécessaire à l’élaboration des décisions publiques, les échanges entre les élus et les groupes d’influence doivent être menés de manière déontologique et transparente pour les citoyens. Il est plus que temps que la France impose ces contreparties aux acteurs du lobbying.

Access info, Africa Europe Faith and Justice Network, AITEC, la coalition de 221 organisations ALTER-EU, les Amis de la Terre France, Anticor, Corporate Europe Observatory, Club JADE, Formindep, Irène Frachon, Sylvie Gilman, Stéphane Horel, Pierre Meneton, Annick Redolfi, OKFN France SmartGov (Parlement & citoyens), Sunlight Foundation, Regards Citoyens, Voxe.org

Ainsi que : Iraqi Journalists Rights Defense Association, Africa Freedom of Information Centre (AFIC), South African History Archives (SAHA), Diritto di Sapere (Italy), African Network of Constitutional Lawyers, Centre for Law and Democracy (Canada/global), Centre for Independent Journalism (Romania), Free Expression Associates (UK), Socio-Economic Rights and Accountability Project (SERAP, Nigeria), Green Alternative (Georgia), Obong Denis (Udo-Inyang Foundation, Nigeria), Cyprus EU Association (KAB), Paul Maassen (independent civil society coordination team on OGP), Laurent Gahungu (ABDP-DRS), Craig Holman (Government affairs lobbyist, Public Citizen), Dwight E. Hines (IndyMedia), Walter Keim (Netizen, Norway), Petru Botnaru (freelance journalist, Moldova)


À propos des signataires :
Access Info est une association internationale qui milite pour l’adoption d’un « droit de savoir » (freedom of information) dans de nombreux pays. L’association fait partie du réseau européen AlterEU qui milite pour une plus grande transparence du lobbying au niveau européen.
Africa Europe Faith and Justice Network (AEFJN) est une association internationale qui travaille pour des relations entre l’Afrique et l’Europe plus justes et équitables. AEFJN travaille pour une plus grande justice économique en Afrique. AEFJN fait partie du réseau international ALTER-EU qui travaille pour une plus grande transparence dans le lobbyig à l’UE.
L’Alliance for Lobbying Transparency and Ethics Regulation (ALTER-EU) est une coalition de 221 organisations, syndicats de la société civile, syndicats, universitaires et entreprises de relations publiques préoccupés par l’influence croissante exercée par les lobbyistes sur l’agenda politique en Europe, et plus précisément à ses conséquences : le déclin démocratique du processus décisionnel européen et le report, l’affaiblissement et le blocage d’urgentes réformes sociales, environnementales et de protection des consommateurs.
Les Amis de la Terre France est une association de protection de l’Homme et de l’environnement, créée en 1970. Elle fait partie de la fédération des Amis de la Terre International, le plus grand réseau écologiste mondial, présent dans 76 pays, avec 2 millions de membres. Au travers des Amis de la Terre Europe, Les Amis de la Terre France font partie du réseau européen AlterEU qui milite pour une plus grande transparence du lobbying au niveau européen.
Anticor est une association française dont le but est de combattre la corruption et réhabiliter la politique.
L’Association Internationale de Techniciens, Experts et Chercheurs (AITEC) est un réseau d’expertise citoyenne qui réalise des propositions alternatives sur l’urbain, les services publics et le financement du développement. L’association fait partie du réseau européen AlterEU qui milite pour une plus grande transparence du lobbying au niveau européen.
Corporate Europe Observatory est une association européenne qui réalise des études et des campagnes sur l’impact dans les prises de décisions européennes de l’accès privilégié et de l’influence réalisés par les entreprises et leurs représentants lobbyistes. L’association fait partie du réseau européen AlterEU qui milite pour une plus grande transparence du lobbying au niveau européen.
Club JADE est un think tank attaché à la valorisation de la démocratie, de l’innovation et de l’Europe au travers des opportunités qu’offrent les technologies numériques.
Formindep est un collectif organisé en association dont le but est de favoriser une formation et une information médicales indépendantes de tout autre intérêt que celui de la santé des personnes. L’association fait partie du réseau AlterEU qui milite pour une plus grande transparence du lobbying au niveau européen.
Irène Frachon est pneumologue au CHU de Brest. Elle est la lanceuse d’alerte du scandale du Médiator. Elle est l’auteur du livre « Mediator 150 mg : Combien de morts ? ».
Sylvie Gilman est réalisatrice de documentaires, dont « Mâles en péril » et « Folies sur ordonnance ».
Stéphane Horel est journaliste et réalisatrice de documentaires, dont « Les Médicamenteurs » et « Les Alimenteurs ».
Pierre Meneton est chercheur à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et spécialiste des maladies cardio-vasculaires. Il a lancé des alertes sur le poids des producteurs de sel et du secteur agroalimentaire sur le milieu de la santé.
Annick Redolfi est réalisatrice de documentaires, dont « Le Dernier choix » et « Les Médicamenteurs ».
Smartgov est une association engagée dans la promotion de l’open government. Elle est à l’origine de Parlement & Citoyens, une plateforme web qui permet aux citoyens de participer à l’élaboration des lois.
La Sunlight Foundation est une organisation non partisane fondée en 2006 aux États-Unis qui utilise les ressources inépuisables d’Internet pour catalyser une plus grande ouverture et transparence gouvernementale.
Regards Citoyens est une association française qui utilise les données publiques pour valoriser les institutions démocratiques. L’association a notamment réalisé les sites d’observation de l’activité parlementaire NosDéputés.fr et NosSénateurs.fr ainsi qu’une étude sur l’empreinte législative laissée par les lobbyistes dans les rapports parlementaires publiés à l’Assemblée nationale.
Voxe.org est une association française qui permet aux citoyens de comparer les programmes des candidats aux élections, et qui milite pour une plus grande transparence de la démocratie.

mercredi 12 juin 2013

Après 8 mois de travail mené conjointement avec le Formindep, la Commission Informatique et Libertés (CNIL) s’est finalement décidée à nous communiquer son avis sur le décret de mai 2012 relatif aux « règles déontologiques et à la déclaration publique d’intérêts » dans le monde de la santé.

La loi Bertrand de 2011 prévoit la large publication des déclarations d’intérêts des responsables des autorités de santé françaises. Le ministre de la santé avait qualifié, tout au long des débats à l’Assemblée nationale, cette initiative politique de « transparence totale »1 du monde de la santé.

L’avis de la CNIL révèle qu’elle est à l’origine de l’interdiction de l’indexation des informations nominatives contenues dans les déclarations, estimant que les « déclarations publiques d’intérêts » publiées notamment par la Haute Autorité de Santé ou l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé, sont à ses yeux des informations « confidentielles ».

On notera que la CNIL n’avance aucune justification juridique pour appuyer sa démonstration.

Pour expliciter son point de vue, la Commission Informatique et Libertés a depuis publié une recommandation indiquant les mesures techniques à mettre en place pour respecter cet avis (et le suivant relatif aux déclarations des cadeaux faits aux médecins). On y découvre que la Commission recommande non seulement de rendre les informations non-utilisables par les moteurs de recherche mais également d’y restreindre l’accès et la réutilisation des données en les enfermant dans des images. Cette dernière recommandation a pour conséquences d’une part d’empêcher associations, citoyens ou journalistes d’agréger les données relatives à ces déclarations, et d’autre part de retirer la possibilité aux personnes en situation de handicap visuel d’accéder à ces documents, par exemple via leurs interfaces de conversion des documents textuels en braille.

1 – Regards Citoyens s’est toujours exprimé contre la notion de « transparence totale ». Très attachée au respect de la vie privée, notre association ne fait que militer pour une plus grande transparence démocratique, principe constitutionnel en France.

Pour plus d’informations sur le sujet, lire les papiers de Marc Rees de PCINpact, de Stéphane Horel, de Brigitte Rossigneux du Canard Enchaîné et de Benjamin Sourice dans RAGEMAG.

vendredi 7 juin 2013

Retrouvez toutes nos propositions d’amendements pour adresser ces questions lors des débats en hémicycle à partir du 17 juin

La commission des lois de l’Assemblée nationale s’est penchée mardi et mercredi sur les deux projets de loi « Transparence », proposés par le gouvernement suite à l’affaire Cahuzac. Si les députés ont déjà voté plusieurs améliorations intéressantes sur les capacités de contrôle dont disposera la Haute Autorité, la protection des lanceurs d’alertes ou la régulation des dons faits aux partis politiques, des efforts importants restent encore à fournir pour élever cette loi à la hauteur des standards internationaux.

Une Haute Autorité de la Transparence pas transparente ?

Ne voyant aucun intérêt démocratique à la publication détaillée des déclarations de patrimoine, nous saluons le respect de la vie privée des élus assuré par le texte actuel. Mais il convient cependant d’assurer également la transparence !

Alors que la loi CADA, très utile aux journalistes, impose une certaine transparence à la majorité des administrations françaises1, le texte adopté par la commission des lois prévoit que la Haute Autorité soit exclue du champ de la CADA. À vouloir dupliquer des mesures juridiques déjà existantes, puisque la loi garantit déjà que les documents liés à la vie privée ne soient pas diffusables à tous, cette exclusion rendrait inaccessibles aux journalistes, citoyens ou chercheurs des documents démocratiques essentiels sur la HAT : budget, marchés publics attribués, avis donnés en amont de prises de décisions règlementaires, recommandations générales sur les conflits d’intérêts ou le lobbying…

À l’heure actuelle, aucune autorité ou administration n’est entièrement exclue de la loi CADA. Si le texte était adopté en l’état, la Haute Autorité de la Transparence s’avèrerait l’administration la moins transparente de France, un comble !

Vers une publication restreinte des déclarations d’intérêts

Les derniers débats au Parlement visant à légiférer sur les conflits d’intérêts faisaient suite au scandale du Médiator. Les deux chambres ont alors voté des dispositions dites « Sunshine », visant à rendre largement publiques les déclarations d’intérêts des acteurs de la santé. Pourtant, en quelques mois, deux décrets ont réduit la volonté du législateur à un accès au compte-goutte à ces informations. Sous l’impulsion de la CNIL, les déclarations d’intérêts des membres de la HAS ou de l’ANSM, ainsi que les listes de cadeaux faits par les laboratoires aux medecins, ont été cadenassées par des mesures techniques : désindexation des moteurs de recherche, accès complexifié par l’usage de captchas… Pire, la CNIL recommande aujourd’hui de transformer les données de ces déclarations d’intérêts en images pour s’assurer que ces informations ne soient ni cherchables ni réutilisables.

C’est pourtant grâce à la réutilisation que la publication des déclarations d’intérêts pourra susciter des effets positifs. Loin de stigmatiser des personnes individuellement, la réutilisation de ces données dans leur ensemble pourrait, par exemple, mettre en lumière la surreprésentation de certains intérêts dans le monde de la santé, et leur lien avec des décisions politiques rétrospectivement contestables.

Le même travers semble se préparer pour les déclarations d’intérêts des élus et responsables publics. Après être revenus sur la publication des déclarations patrimoniales, les députés vont-il entériner le verrouillage des déclarations d’intérêts ? Les modifications apportées au projet de loi semblent l’annoncer à mots couverts. Au lieu de garantir, comme nous le proposions, une large réutilisation des informations contenues dans ces déclarations, la commission des lois a décidé de faire intervenir ici aussi la CNIL dans le mécanisme de publication.

Alertes citoyennes : un simple gadget de communication ?

La notion de conflit d’intérêts est une notion complexe à cerner pour les élus comme pour les citoyens, car chacun de ces conflits est le fruit d’un contexte particulier. Il est nécessaire de pouvoir s’appuyer sur une institution de référence pour aider à mieux l’appréhender. Nos propositions incluent à cette fin la possibilité pour les citoyens de questionner la HAT sur des situations particulières.

Pour éviter que la Haute Autorité ne soit trop sollicitée, et pour privilégier le dialogue entre élus et citoyens à un mécanisme de délation, nous suggérons que les citoyens interrogent en premier lieu leur élu. Si ce dernier ne répond pas, ou de manière incomplète, le citoyen pourrait alors se tourner vers la Haute Autorité pour obtenir une réponse à sa question. De plus, pour éviter que des sollicitations abusives ne viennent handicaper les élus durant les campagnes, nous imaginons un délai supplémentaire en période électorale, permettant de reporter d’éventuelles explications à l’issue de celle-ci.

Nous nous félicitons que la commission des lois ait entériné avec l’aval du gouvernement la protection des lanceurs d’alerte se manifestant auprès des déontologues ou des associations anti-corruption et la possibilité pour les citoyens d’écrire à la HAT. Cependant ce dernier mécanisme s’avère dénué d’obligation de réponse de l’autorité et circonscrit à la seule interrogation sur un patrimoine suite à sa consultation en préfecture. Plutôt que de s’attacher à la détection de conflit d’intérêts, interroger simplement les patrimoines ne permet que difficilement de juger si une situation est source de conflit ou non. De plus, la Haute Autorité n’ayant aucune obligation d’examiner les « alertes citoyennes », le risque est réel de voir les citoyens se désintéresser d’un mécanisme qui laisserait leurs interrogations sans réponse. Face à une HAT silencieuse, n’ayant aucune obligation de réponse, le dépôt de ces alertes ne servirait à défaut qu’à amplifier une rumeur infondée, au lieu d’aider à prévenir des situations problématiques. La CADA qui gère plus de 3000 réponses à des sollicitations citoyennes ou journalistiques chaque année montre pourtant qu’un tel mécanime peut être à la fois réaliste et efficace.

Lobbying et cumul des activités : députés, ne restez pas au milieu du gué

Les débats en commission ont montré que ce projet de loi pourrait être l’occasion de légiférer sur les principaux problèmes soulevés par le scandale Cahuzac. Les débats initiés par René Dosière sur le plafonnement des rémunérations professionnelles, ou par Matthias Fekl sur la pénalisation d’un enrichissement non justifié des élus, peuvent faire émerger de bonnes dispositions. De même, si le rapporteur Jean-Jacques Urvoas a souhaité inclure la question du lobbying dans le domaine d’expertise de la HAT, il nous semble possible d’aller plus loin en imposant à tous les lobbyistes de s’enregistrer dans un registre géré par la Haute Autorité et de déclarer annuellement leurs activités et dépenses liées. En proposant notre amendement sur la question, Pierre Morel-A-L’Huissier a ouvert le débat.

Nous serons attentifs à ce que ces thèmes fassent partie intégrante de ces futures lois sur la transparence de la vie publique, sans quoi ces textes, déjà considérés par beaucoup comme trop limités, ne sauront réellement lever le voile de l’opacité sur la vie publique et politique française.

Comme pour les discussions en commission, nous publierons lundi, lorsqu’elle sera finalisée, une note détaillant les améliorations juridiques qui pourraient permettre aux parlementaires de prendre en compte nos remarques en amendant cette nouvelle version du texte. En attendant, retrouvez tous les amendements adoptés aux côtés de nos propositions et celles de Transparency International France sur notre outil « Simplifions » pour la loi organique et la loi ordinaire

Retrouvez toutes nos propositions d’amendements
pour adresser ces questions en hémicycle à partir du 17 juin

1 – La Loi du 17 juillet 1978 dite loi CADA, donne le droit à tout citoyen d’accéder à n’importe quel document produit ou détenu par une administration, pourvu que celui-ci ne relève ni de la vie privée ni du secret d’État

mardi 14 mai 2013

Un an après le changement de gouvernement, qu’en est-il de la politique Open Data de la France ? Après une période de tâtonnements qui laissa la part belle aux interrogations, aux inquiétudes, voire aux suppositions délirantes, l’Open Data français et la mission Étalab semblent aujourd’hui reprendre progressivement leur rythme de croisière : des jeux de données importants sont publiés, une refonte de la plateforme data.gouv.fr est engagée et des chantiers prometteurs ont été annoncés.

Comme l’illustre le récent « Ordre Exécutif » publié par la Maison Blanche aux États-Unis, l’Open Data a besoin, pour progresser efficacement au sein de l’administration, de décisions fortes prises directement par l’éxécutif. Aux États-Unis comme au Royaume-Uni, les changements de majorité se sont toujours accompagnés d’un renforcement des politiques Open Data mises en place par les gouvernements sortants. Pour encourager la reproduction de ce cercle vertueux en France, Regards Citoyens a repris depuis la rentrée 2012 un dialogue continu avec les responsables politiques et la mission Étalab autour des différentes questions restant à trancher en France.

Après un important travail réalisé par l’équipe précédente d’Étalab pour imposer notamment la gratuité par défaut et l’emploi d’une licence libre (la Licence Ouverte créée pour l’occasion), il convient aujourd’hui de lever la troisième barrière à l’Open Data : la barrière technique. Les données référencées sur data.gouv.fr devront être des données brutes en formats ouverts. De plus, un effort de formation des producteurs de données devra être engagé pour que ces données puissent être mises en valeur et identifiables grâce à leurs descriptions. Le moteur de recherche devra enfin être amélioré afin de pouvoir découvrir les données de manière plus intuitive. Ce ne sera qu’à l’issue de ces chantiers qu’Étalab pourra envisager d’offir des services tels que des visualisations, comparaisons ou agrégations pour accroitre la coproduction avec les citoyens. Ce sont les points centraux de notre contribution à l’initiative CoDesign visant à rénover data.gouv.fr.

Mais au-delà de la réflexion sur le contenu et les fonctionnalités de data.gouv.fr, nous pensons à Regards Citoyens qu’un certain nombre d’autres chantiers doivent être entrepris pour une politique de données publiques réellement pionnière et innovante. Par souci de transparence, nous avons rassemblé au sein d’une note de synthèse, l’ensemble des propositions et positions que nous avons pu formuler au cours des derniers mois : libération de données prioritaires telles que les données juridiques, celles des marchés publics ou des entreprises… ; adhésion de la France à l’OpenGov Partnership ; réforme du droit d’auteur des fonctionnaires ; révision à venir de la directive PSI

L’un des points centraux de ce plaidoyer concerne les données d’administrations comme la DILA, l’INSEE, l’IGN ou le Shom qui restent encore soumises à redevances, au sujet desquelles une mission d’évaluation des modèles économiques a débuté suite aux derniers CIMAP. Ces données rassemblent en effet des informations démocratiques aussi centrales que le Journal Officiel, les codes de loi, la jurisprudence, les offres de marchés publics (BOAMP) ou la base des entreprises (SIRENE). Mais elles restent encore aujourd’hui fermées derrière des coûts exorbitants, parfois même reconduits sans aucune préoccupation apparente de l’existence d’Étalab. Alors que ces barrières semblent souvent injustifiés au regard des budgets effectifs des administrations concernées et de leurs chiffres d’affaires liés à la vente de données, nous estimons que la libération de ces données est prioritaire. Nous suggérons pour cela une stratégie innovante centrée sur l’idée de proposer en parallèle des redevances existantes un second régime collaboratif reposant sur la licence ODbL. Ce modèle contributif à double régime permettrait aux producteurs de conserver leurs sources de financement sans pour autant créer de barrières économiques à la réutilisation des données par le grand public.

Porteurs de ces différentes propositions, nous nous réjouissons de rejoindre aujourd’hui le réseau d’experts formé par Étalab qui réunira une trentaine d’acteurs de la communauté environ une fois tous les deux mois pour discuter des évolutions nécessaires et possibles et ainsi continuer à partager nos expériences de réutilisateurs citoyens avec Étalab. Si nous avions pu refuser par le passé de rejoindre nominativement le jury de DataConnexions, trop éloigné de nos préoccupations et pauvrement constitué en représentants de la société civile, c’était avant tout parce que les travaux et l’expertise de Regards Citoyens sont le fruit de notre gouvernance ouverte : partage de la connaissance et fonctionnement collaboratif. Nous ne pouvions donc accepter la proposition de rejoindre le réseau d’experts qu’à condition de respecter ces principes. Nous apprécions donc qu’Étalab aie accepté une représentation collégiale de notre association au sein de ce comité auprès duquel nous continuerons de défendre les valeurs d’ouverture et de transparence nécessaires à l’OpenData.

Retrouvez l’ensemble de nos plaidoyers en ligne

Le respect de notre fonctionnement collégial imposait une légère modification de la charte d’engagement du réseau d’experts afin de reconnaître la nomination au réseau d’une association au représentant tournant. Nous avons donc « forké » avec l’accord d’Etalab la charte officielle et publions notre version légèrement modifiée (modification en gris) ici.

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